<i>Voir</i><i>l'eau</i><i>autrement</i>

Voirl'eauautrement

Un récit socio-technique proposé par les étudiants d'Hutech

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CC BY-SA : Ida BOURIN-LINNMAN, France FAUCHER, Elise LEROYER, Marine MADDENS, Noah SAPIR
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En cette douce matinée de novembre 2050, le soleil sort de son sommeil pour aller enflammer l’immensité de la surface d’un lac, caresser de ses rayons les feuilles d’un bosquet, animer les sommets des montagnes, réchauffer le sol encore gelé et poursuivre sa course aux quatre coins de la terre. Partout où le soleil rayonne, des humains assistent à cet unique spectacle qui se renouvelle à leurs yeux un peu différemment chaque matin. Ils s’éveillent avec cet astre dont ils savent apprécier la caresse, tout comme ils apprécient la fraîcheur d’une averse et la délicate odeur de la pluie. Cette eau si belle les rend un peu plus vivants chaque jour, elle ruisselle dans leurs champs, nourrit leur industrie et fait pleinement partie de leur quotidien. Ces êtres humains connaissent la préciosité de l’eau qu’ils respectent, qui prend soin d’eux et dont ils savent prendre soin.

Tout comme le corps humain est constitué aux deux tiers de ce précieux liquide, la planète Terre est recouverte à 70% d’eau. Si cette identité n’est vraisemblablement que pure coïncidence, il ne fait néanmoins pas mystère que l’eau est d’une importance capitale pour la vie, pour toute vie. La dépendance à l’eau est universelle : l’homme en a une nécessité absolue, mais il n’est pas le seul, c’est aussi le cas de la grande majorité des êtres vivants, et il est aujourd’hui évident de considérer que l’eau doit être répartie équitablement entre tous les êtres terrestres. L’ignorance de la primordialité de l’eau tant pour les processus vitaux que les processus géophysiques a disparu, éradiquée grâce à la sensibilisation et l’éducation à l’eau, à sa valeur, à sa rareté, et à ses cycles.

Il n’y avait pourtant là pas d’évidence : il y a encore peu, les consommations humaines reposaient sur un usage effréné et irraisonné de l’eau, qui était alors considérée comme une ressource inépuisable dont l’utilisation démesurée allait de soi, l’eau s’était même raréfiée dans des lieux où elle se trouvait auparavant en abondance. Alors qu’aujourd’hui l’humanité se satisfait sans privation aucune d’un juste nécessaire d’eau, utiliser 2500 litres d’eau pour produire un T-shirt parmi la multitude que chacun possédait, ou gaspiller 9 litres d’eau à chaque chasse d’eau tirée était anodin et banalisé. Pareilles folies ne sont plus envisageables, et font même horreur, par leur absurdité, à qui s’arrête à y penser. La soif dispendieuse de l’humanité a pris fin : l’eau a été rendue commensurable, perceptible dans tous ses états, il n’est plus question de la polluer par des rejets d’effluents industriels, de s’en servir à mauvais escient, ou de l’utiliser en quantités hors de mesure.

La quantité, d’ailleurs, n’est pas le seul aspect sur lequel l’homme a appris la modération, il sait aussi que la qualité de l’eau est primordiale. Si la restituer à l’environnement après usage est une chose, la retourner dans une qualité favorable aux processus vitaux en est une autre : il s’agit de respecter l’eau, mais aussi de la régénérer. Le cycle de l’eau n’est plus distinct du cycle vital de l’être humain : ils fonctionnent désormais en symbiose.

L’eau, omniprésente, est utilisée majoritairement dans trois domaines, à savoir l’agriculture, l’industrie et l’univers domestique. De nos jours, il en est fait l’usage suivant :
  • Pour l’agriculture, l’eau est répartie de manière réfléchie et rationnelle. Dans les zones arides où de faibles quantités sont disponibles, la production de végétaux moins consommateurs d’eau est privilégiée. En effet, l’agriculture se veut locale et adaptée aux conditions météorologiques, climatiques et géographiques de la région, « les variétés régionales, adaptées à notre climat et à la nature de nos sols fleurissent » . La possibilité de ce modèle repose sur une modification des pratiques de l’agriculture : l’utilisation des produits chimiques et artificiels polluant les sols et les eaux a cessé, l’irrigation se réalise au maximum en utilisant les forces naturelles, et ne se pratique que sur les zones d’intérêt de chaque plante, minimisant l’énergie et l’eau nécessaires. L’agriculture trouve un équilibre entre intensive et extensive et fonctionne, à la manière de l’eau, en cycle rythmé par les saisons et les conditions météorologiques. La production alimentaire tout comme l’irrigation se font également de manière particulièrement locale : au sein des villes par exemple, les toits abritent des potagers citadins, et lorsque ce n’est pas le cas, ils sont équipés de systèmes de récupération de l’eau de pluie, destinée à un usage domestique. Des stations d’épuration plus localisées sont insérées dans les villes et villages pour permettre une utilisation en cycle court de l’eau. En ce qui concerne le pompage des nappes phréatiques, des systèmes d'adduction par puits construits artificiellement peuvent être employés lorsque les ressources d’eau en surface ne suffisent plus. Les barrages sont réduits : ils bloquent le libre cours de l’eau et bouleversent les écosystèmes. Il est inimaginable de dévier l’entièreté d’un cours d’eau ou de pomper jusqu’à épuisement les nappes phréatiques.
  • Pour l’industrie, l’usage de l’eau n’est plus déraisonnable. La réglementation sur les rejets de l’eau se veut en effet radicale. Les procédés qui ne nécessitent pas ou peu d’eau sont privilégiés, et sont constitutifs de la majeure partie des productions industrielles. Lorsque l’implication de l’eau est inévitable, elle s’utilise, se nettoie et se purifie localement, puis se réutilise : il est impossible de rejeter une eau qui contreviendrait aux principes de respect de l’environnement et de compatibilité avec la vie et les processus naturels. Ces usages reposent sur l’utilisation de produits naturels, facilement extractibles de l’eau et sur un traitement local et complet de l’eau une fois son utilisation terminée. Nous disions par exemple autrefois que pour connaître la nouvelle couleur à la mode il suffisait de regarder les rivières en Chine. Aujourd’hui, les habits que nous achetons sont conçus pour durer à partir de composants et traitements naturels, et en posséder pléthore n’est non seulement plus encouragé, mais est surtout fortement déprécié.
  • Pour les usages domestiques, la consommation d’eau est de plus faible quantité, source d’économie également en énergie, et augmente en ingéniosité. L’eau n’est plus amenée à la ville par des canalisations, elle y vit et cohabite avec les autres étants du lieu. Les sols y sont par exemple recouverts de matériaux perméables et pensés pour le remplissage naturel des nappes souterraines. L’eau excédentaire est stockée afin de pouvoir servir aux sanitaires, à l’arrosage, à la machine à laver, au lave-vaisselle et même à la douche. Cette eau, une fois utilisée, n’a pas besoin de parcourir des centaines de kilomètres pour être traitée et revenir, car la phytoépuration s’invite dans la ville. Jardins et parcs sont lieux de convivialité et de cohabitation, la nature fleurit le paysage et régénère notre eau. En miroir de cela, les produits ménagers utilisés sont uniquement composés de produits naturels dégradables par les végétaux mobilisés. Quant à l’eau potable, elle est un droit et un besoin primaire, il lui a été réservé un réseau privilégié. Sa production varie en fonction des villages, des villes et des pays, pour s’adapter aux spécificités et nécessités de chacun. Les quantités nécessaires à produire sont réduites, l’eau potable est aujourd’hui uniquement destinée à la consommation alimentaire. Ainsi, de nombreuses formes de productions alternatives ont vu le jour, en zones urbaines mais également en zones rurales, exposées aux tensions hydriques. Les habitations ne sont plus nécessairement reliées à de larges réseaux de distribution mais à des productions locales adaptées aux conditions socio-économico-politico-techniques du lieu considéré.
  1. Verrou 1 : la relation de domination et de scission entre homme et nature

    Aujourd’hui l’Homme s’octroie le droit de s’accaparer le vivant et les choses et de les saccager de façon très spectaculaire et parfaitement exhaustive. L’Homme se comporte et se voit omnipotent, maître au-dessus des autres entités biotiques et abiotiques au point qu’il se manifeste en tant que force géologique.
  2. Verrou 2 : la géographie de certains lieux peut conduire à des problèmes d’alimentation

    À cause de la surpopulation et surexploitation, les zones agricoles s’étendent de plus en plus jusqu’à devoir se localiser dans des zones éloignées de cours d’eau naturels. Les zones d’irrigation pour pouvoir cultiver certaines terres sont rendues compliquées.
  3. Verrou 3 : la culture de l’agriculture intensive et la forte dépendance à cette culture pour la société

    En 2022, il semble être difficile de se passer de mangue, de courgette l’hiver ou de poivron. Dans nos supermarchés nous nous attendons toujours à des paniers garnis de fruits et légumes en abondance. Pourtant c’est un mode d’agriculture intensif qui est nécessaire pour obtenir ceci, ça n’est plus viable et engendre de la surproduction du gaspillage et une surconsommation d’eau du fait que certains aliments en soient très demandeurs pour qu’ils puissent pousser sous certaines conditions climatiques.

    Le problème vient alors du fait que les consommateurs ne peuvent se résigner à ne consommer que des produits de saison et locaux et donc que les agriculteurs continuent de subvenir à ces besoins car ils sont toujours présents (on pense ici particulièrement à l’Espagne).
  4. Verrou 4 : des infrastructures trop centralisées

    En 2022, les infrastructures d’irrigation de l’agriculture sont déjà mises en place. Cela rend plus difficile la transition vers d’autres modes d’irrigation. La décentralisation et le changement de structures demanderait la mise en arrêt de nombreuses surfaces agricoles, détruirait ou abîmerait les plantations.
  5. Verrou 5 : des stations d’épurations isolées les unes des autres et de trop grande dimension pour remplir les attentes de traitement des eaux usées

    En 2022, les stations d’épuration sont utilisées pour traiter l’eau qui est ensuite rejetée dans les cours d’eau. Elles sont très grandes et isolées, et ne permettent pas de recycler de l’eau et de la réinjecter directement chez les utilisateurs. La création de petites stations est rendue difficile du fait de la présence de grandes centrales et de l’acceptation d’une station au sein de la ville ou du village peut être plus difficile.
  6. Verrou 6 : des systèmes d’irrigation choisis selon un point de vue purement économique et de facilité

    Les grandes installations d'irrigation sont souvent détenues par des compagnies privées, dont les choix sont dirigés par la course au profit. Cela engendre un choix d’utilisation de technologies d’alimentation en eau pour les cultures majoritairement basé sur l’économie financière et non sur l’économie de l’eau et la recherche en efficacité. Le problème est que les systèmes d’irrigation efficaces pour économiser l’eau sont plus chers et donc peu privilégiés par les compagnies. Ils nécessitent en outre des travaux plus importants.
  7. Verrou 7 : l'eau, vue et utilisées comme une ressource infinie

    Les procédés actuels sont par défaut très consommateurs en eau : elle sert de fluide de refroidissement, de compression, de lavage, etc. C'est bien ici un verrou purement socio-technique auquel on a affaire.
  8. Verrou 8 : la difficulté à valoriser les produits naturels, souvent moins efficaces et/ou plus coûteux

    La recherche du profit et de l’économie du coût à tout prix encourage l’utilisation de produits moins coûteux mais plus nocifs pour l’environnement et néglige l’importance du recyclage de l’eau, souvent onéreux.
  9. Verrou 9 : nécessité, mais difficulté, de dépolluer ce qui est aujourd’hui endommagé

    De nombreux sols, rivières et autres éléments naturels sont pollués à l’extrême, et entraînent donc des pollutions de l’eau supplémentaires, que ce soit par évaporation et retombées pluviales, par infiltration dans les sols ou par écoulement naturel des eaux.
  10. Verrou 10 : la consommation de l’eau domestique comme une ressource inépuisable

    Dans nos ménages occidentaux, l’eau domestique est utilisée comme une ressource inépuisable, nous n’avons même pas conscience de la quantité d’eau que nous utilisons quotidiennement. L’eau domestique est utilisée majoritairement pour l’hygiène (sanitaires, bains et douche) et pour tout usage, il s’agit d’eau potable. Si l’accès à l’eau potable n’est pas considérée comme problématique dans les pays occidentaux, plusieurs étapes sont nécessaires pour que cela soit ainsi. Ainsi, acheminer l’eau et la chauffer pour les usages domestiques requiert des infrastructures, des traitements, de l'énergie, etc. Aussi, bien que la dépollution de l’eau soit effectuée rigoureusement et soit contrôlée, les cours d’eau dans lesquels sont rejetés les eaux usées n’échappent pas à la micropollution (microplastiques dans les cosmétiques, etc.).
  11. Verrou 11 : la vision de l’eau comme ressource inépuisable

    Dans les pays occidentaux, l’eau est un dû, au même titre que l’électricité, elle arrive dans les demeures sans que les habitants en soient conscients. Structurellement, tout pousse l’utilisateur à ne se soucier ni de l’arrivée ni de l’évacuation de l’eau. Ainsi, en moyenne, 150 à 170 litres d’eau sont consommés par un français dans une journée. Pourtant, pour que les habitations soient ainsi équipées, l’eau parcourt un long chemin. En effet, 68 % de l’eau que nous consommons provient principalement des eaux souterraines comme les nappes phréatiques et 32 % des eaux de surface comme les rivières.
  12. Verrou 12 : la construction de lieux de vies dans des zones arides et difficulté d’accès à l’eau dans ces régions

    La ville de Las Vegas, située en plein désert, offre un exemple incontournable de la construction de lieux de vie dans une région ou la consommation d’eau n’est possible sans l’intervention humaine. En effet, les précipitations sont rares et un seul fleuve parcourt la région : le Colorado. La construction d’un barrage débuta en 1931 pour permettre l’alimentation en eau et en électricité de cette ville. Mesurant 220 mètres de haut, 379 mètres de long et 13 à 201 mètres d’épaisseur, le barrage endigue le fleuve Colorado en un lac de 640 km² : le lac Mead. Cependant, l’eau se fait de plus en plus rare, le gaspillage de l’eau et la croissance démographique étant très importants.
  13. Verrou 13 : la mauvaise répartition de l’eau dans certains pays et les difficultés d’accès à l’eau

    Aujourd’hui, 7 millions de personnes, dont au moins 2 millions d’enfants de moins de 5 ans, meurent chaque année de maladies liées à l’eau. Et 1,4 milliard de personnes dans le monde n’ont pas accès à l’eau potable. L’Ethiopie notamment est victime d’un manque d’eau. Ce manque d’eau entraîne une difficulté à cultiver et à alimenter les lieux de vie, le risque de maladie et d’infection devient élevé, aussi le temps consacré à la recherche de l’eau se soustrait du temps de disponibilité auprès des enfants et au sein des familles. Ce manque met en lumière la nécessité de l’eau pour l’agriculture, les usages domestiques (boire, cuisiner, se laver) et également pour le soin. Une disparité dans la répartition de l’eau à la surface de la Terre se fait ressentir et beaucoup se trouvent dans des situations d’inégalité d’accès à l’eau.
  14. Verrou 14 : les infrastructures actuelles de production potable sont décentralisées et gérées par des acteurs déconnectés des consommateurs

    L’accès des zones très rurales à l’eau potable est difficile et expose des habitants à un stress hydrique allant jusqu’à exploiter des sources en eau impropres à la consommation.
En cette douce matinée de novembre 2050, le soleil sort de son sommeil pour aller enflammer l’immensité de la surface d’un lac, caresser de ses rayons les feuilles d’un bosquet, animer les sommets des montagnes, réchauffer le sol encore gelé et poursuivre sa course aux quatre coins de la terre. Partout où le soleil rayonne, des humains assistent à cet unique spectacle qui se renouvelle à leurs yeux un peu différemment chaque matin. Ils s’éveillent avec cet astre dont ils savent apprécier la caresse, tout comme ils apprécient la fraîcheur d’une averse et la délicate odeur de la pluie. Cette eau si belle les rend un peu plus vivants chaque jour, elle ruisselle dans leurs champs, nourrit leur industrie et fait pleinement partie de leur quotidien. Ces êtres humains connaissent la préciosité de l’eau qu’ils respectent, qui prend soin d’eux et dont ils savent prendre soin.

Tout comme le corps humain est constitué aux deux tiers de ce précieux liquide, la planète Terre est recouverte à 70% d’eau. Si cette identité n’est vraisemblablement que pure coïncidence, il ne fait néanmoins pas mystère que l’eau est d’une importance capitale pour la vie, pour toute vie. La dépendance à l’eau est universelle : l’homme en a une nécessité absolue, mais il n’est pas le seul, c’est aussi le cas de la grande majorité des êtres vivants, et il est aujourd’hui évident de considérer que l’eau doit être répartie équitablement entre tous les êtres terrestres. L’ignorance de la primordialité de l’eau tant pour les processus vitaux que les processus géophysiques a disparu, éradiquée grâce à la sensibilisation et l’éducation à l’eau, à sa valeur, à sa rareté, et à ses cycles.
Il n’y avait pourtant là pas d’évidence : il y a encore peu, les consommations humaines reposaient sur un usage effréné et irraisonné de l’eau, qui était alors considérée comme une ressource inépuisable dont l’utilisation démesurée allait de soi, l’eau s’était même raréfiée dans des lieux où elle se trouvait auparavant en abondance. Alors qu’aujourd’hui l’humanité se satisfait sans privation aucune d’un juste nécessaire d’eau, utiliser 2500 litres d’eau pour produire un T-shirt parmi la multitude que chacun possédait, ou gaspiller 9 litres d’eau à chaque chasse d’eau tirée était anodin et banalisé. Pareilles folies ne sont plus envisageables, et font même horreur, par leur absurdité, à qui s’arrête à y penser. La soif dispendieuse de l’humanité a pris fin : l’eau a été rendue commensurable, perceptible dans tous ses états, il n’est plus question de la polluer par des rejets d’effluents industriels, de s’en servir à mauvais escient, ou de l’utiliser en quantités hors de mesure [Verrou 1 LIEN].

La quantité, d’ailleurs, n’est pas le seul aspect sur lequel l’homme a appris la modération, il sait aussi que la qualité de l’eau est primordiale. Si la restituer à l’environnement après usage est une chose, la retourner dans une qualité favorable aux processus vitaux en est une autre : il s’agit de respecter l’eau, mais aussi de la régénérer. Le cycle de l’eau n’est plus distinct du cycle vital de l’être humain : ils fonctionnent désormais en symbiose.

L’eau, omniprésente, est utilisée majoritairement dans trois domaines, à savoir l’agriculture, l’industrie et l’univers domestique. De nos jours, il en est fait l’usage suivant :
  • Pour l’agriculture, l’eau est répartie de manière réfléchie et rationnelle. Dans les zones arides où de faibles quantités sont disponibles, la production de végétaux moins consommateurs d’eau est privilégiée. En effet, l’agriculture se veut locale et adaptée aux conditions météorologiques, climatiques et géographiques de la région, « les variétés régionales, adaptées à notre climat et à la nature de nos sols fleurissent » . La possibilité de ce modèle repose sur une modification des pratiques de l’agriculture : l’utilisation des produits chimiques et artificiels polluant les sols et les eaux a cessé, l’irrigation se réalise au maximum en utilisant les forces naturelles, et ne se pratique que sur les zones d’intérêt de chaque plante, minimisant l’énergie et l’eau nécessaires [Verrou 2 LIEN]. L’agriculture trouve un équilibre entre intensive et extensive et fonctionne, à la manière de l’eau, en cycle rythmé par les saisons et les conditions météorologiques [Verrou 3 LIEN]. La production alimentaire tout comme l’irrigation se font également de manière particulièrement locale : au sein des villes par exemple, les toits abritent des potagers citadins, et lorsque ce n’est pas le cas, ils sont équipés de systèmes de récupération de l’eau de pluie, destinée à un usage domestique [Verrou 4 LIEN]. Des stations d’épuration plus localisées sont insérées dans les villes et villages pour permettre une utilisation en cycle court de l’eau [Verrou 5 LIEN]. En ce qui concerne le pompage des nappes phréatiques, des systèmes d'adduction par puits construits artificiellement peuvent être employés lorsque les ressources d’eau en surface ne suffisent plus. Les barrages sont réduits : ils bloquent le libre cours de l’eau et bouleversent les écosystèmes. Il est inimaginable de dévier l’entièreté d’un cours d’eau ou de pomper jusqu’à épuisement les nappes phréatiques [Verrou 6 LIEN].
  • Pour l’industrie, l’usage de l’eau n’est plus déraisonnable [Verrou 7 LIEN]. La réglementation sur les rejets de l’eau se veut en effet radicale. Les procédés qui ne nécessitent pas ou peu d’eau sont privilégiés, et sont constitutifs de la majeure partie des productions industrielles. Lorsque l’implication de l’eau est inévitable, elle s’utilise, se nettoie et se purifie localement, puis se réutilise : il est impossible de rejeter une eau qui contreviendrait aux principes de respect de l’environnement et de compatibilité avec la vie et les processus naturels. Ces usages reposent sur l’utilisation de produits naturels, facilement extractibles de l’eau et sur un traitement local et complet de l’eau une fois son utilisation terminée [Verrou 8 LIEN]. Nous disions par exemple autrefois que pour connaître la nouvelle couleur à la mode il suffisait de regarder les rivières en Chine. Aujourd’hui, les habits que nous achetons sont conçus pour durer à partir de composants et traitements naturels, et en posséder pléthore n’est non seulement plus encouragé, mais est surtout fortement déprécié [Verrou 9 LIEN].
  • Pour les usages domestiques, la consommation d’eau est de plus faible quantité, source d’économie également en énergie, et augmente en ingéniosité. L’eau n’est plus amenée à la ville par des canalisations, elle y vit et cohabite avec les autres étants du lieu. Les sols y sont par exemple recouverts de matériaux perméables et pensés pour le remplissage naturel des nappes souterraines. L’eau excédentaire est stockée afin de pouvoir servir aux sanitaires, à l’arrosage, à la machine à laver, au lave-vaisselle et même à la douche [Verrou 10 LIEN]. Cette eau, une fois utilisée, n’a pas besoin de parcourir des centaines de kilomètres pour être traitée et revenir, car la phytoépuration s’invite dans la ville. Jardins et parcs sont lieux de convivialité et de cohabitation, la nature fleurit le paysage et régénère notre eau. En miroir de cela, les produits ménagers utilisés sont uniquement composés de produits naturels dégradables par les végétaux mobilisés. Quant à l’eau potable, elle est un droit et un besoin primaire, il lui a été réservé un réseau privilégié [Verrou 11 LIEN]. Sa production varie en fonction des villages, des villes et des pays, pour s’adapter aux spécificités et nécessités de chacun [Verrou 12 LIEN]. Les quantités nécessaires à produire sont réduites, l’eau potable est aujourd’hui uniquement destinée à la consommation alimentaire. Ainsi, de nombreuses formes de productions alternatives ont vu le jour, en zones urbaines mais également en zones rurales, exposées aux tensions hydriques. Les habitations ne sont plus nécessairement reliées à de larges réseaux de distribution mais à des productions locales adaptées aux conditions socio-économico-politico-techniques du lieu considéré [Verrou 13 LIEN et verrou 14 LIEN].

Avant-projets / idées de projets en réaction aux verrous

Avant-projet contre le verrou 2 LIEN : réduction des surfaces agricoles - cultures étagées
En réponse au verrou 2, il peut paraître pertinent de proposer une évolution du paradigme législatif qui viserait à encadrer et réguler les surfaces agricoles :
  • Les zones agricoles ne se développeront plus jusqu’à des zones complètement arides ou éradiquer des forêts entières ;
  • Les surfaces agricoles étagées se développeront ;
  • Les forêts et le maintien de sa biodiversité naturelle seront privilégiées face au développement des cultures ;
  • Les surfaces agricoles seront pensées dans des productions de juste nécessaire et destinée à l’alimentation.
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La culture hors sol fait appel à des milieux de cultures optimisés sans lien physique avec le sol, avec ou sans contenants ; parfois même sans substrat. Il est difficile de dater précisément l’origine de ce mode de culture. Les archéologues retiennent souvent aux IXe et Xe siècles les cultures de légumes sur radeau des aztèques dans la cité, en partie lacustre, de Tenochtitlan, l’actuelle Mexico. Longtemps ce procédé de culture fut essentiellement utilisé pour acquérir de nouvelles connaissances sur la nutrition des plantes. Citons, pour l'essentiel, les travaux de Jean-Baptiste Van Helmont (1579 – 1664), ceux de l’agronome français Jean-Baptiste Boussingault (1802-1887). Après une utilisation à des fins de ravitaillement des armées américaines sur les îles du Pacifique durant la seconde guerre mondiale, les cultures hors sol sous serres se développèrent en Hollande puis en France sans oublier les premières cultures sans substrat, en Angleterre, à partir de concept de NFT (nutrient film technique) mis au point par Alan Cooper. Pour permettre la réduction des surfaces agricoles sur la terre et permettre l'agriculture dans des zones naturellement infertiles, la culture hors sol est devenue très intéressante et développée. Le projet MODAL (association Akhiam) est l’une des avancées les plus récentes en matière de culture hors sol : Les organisations SENS et AKHIAM ont mis en place un projet innovant d’agriculture d’orge grâce à l’hydroponie dans le village d’Agoudal, au Maroc. L’hydroponie est une technique de culture hors-sol qui utilise des solutions nutritives renouvelées et un substrat minéral ou végétal inerte. Cette culture d’orge permet de nourrir une centaine d’animaux toute l’année. Ainsi, dans une zone aride où peu de terres sont cultivables mais où les besoins alimentaires sont élevés, la population est en capacité de produire des céréales.
Avant-projet contre le verrou 10 LIEN : les WC alternatifs
En réponse au verrou 10 et au fait que 9 litres d’eau sont consommés à chaque fois qu’une chasse d’eau est tirée, il peut être intéressant de proposer des solutions techniques alternatives, utilisant très peu, voire plus du tout d’eau.
Certaines alternatives existent bien qu’elles ne soient pas encore majoritaires :
  • Les toilettes sèches : le Low-tech Lab propose un guide permettant de construire ses propres toilettes sèches en 2 heures et pour 80 euros seulement.
  • Les toilettes à séparation : un modèle de toilettes séparant les excréments de l’urine a été proposé par ECODOMEO.
  • Les toilettes turques sont un modèle largement répandu et disponible sur le marché.
  • L’utilisation de l’eau de pluie pour la chasse d’eau : il s’agit plus de bricolage que d’un réel système proposé.
Avant-projet contre le verrou 11 LIEN : dispositifs permettant de quantifier l’eau lorsqu’elle est utilisée
En réponse au verrou 11 et dans le but d’une prise de conscience collective sur la finitude de nos ressources, il pourrait être intéressant de rendre l’eau commensurable, c’est-à-dire qu’un outil de mesure indiquerait le volume d’eau qui s’écoulerait de chaque robinet, pommeau de douche, chasse d’eau, etc.
Avant-projet contre le verrou 12 LIEN : filets récupérant l’eau du brouillard dans les zones désertiques
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En réponse au verrou 12 et pour tenter de résoudre les inégalités d’accès à l’eau dans les zones où cette dernière est difficile d’accès, il pourrait être intéressant de proposer des solutions techniques adaptées aux conditions géographiques des régions et aux contraintes diverses.
Les filets à brouillard sont un exemple de ce type de solution technique.
Dans des villages situés dans des zones désertiques, des filets récupérant l’eau du brouillard sont construits. Ces grands filets sont tendus et obligent les minuscules gouttelettes d’eau qui constituent le brouillard à se condenser en eau qui emprunte des canalisations et, par gravité, arrive au réservoir du village. Il s’agit d’une technique utilisée par les nomades et donc pas d’un solutionnisme technologique qui viserait à rendre vivable une région qui n’est pas faite pour l’être. Cette réponse semble au contraire parfaitement adaptée aux contraintes météorologiques locales. Cette technique ne requiert aucune énergie, les constructions sont simples et la maintenance peut se faire localement avec des matériaux courants. La quantité d’eau semble amplement suffisante pour alimenter les villages voisins.
Avant-projet contre le verrou 13 LIEN : des projets portés par des ONG sensibles aux inégalités d’accès à l’eau
Dans le but de répondre au verrou 13 et de tendre vers une juste répartition de l’eau entre les pays, il pourrait être intéressant de mettre en place une réelle solidarité internationale.

Différentes ONG mettent en place des projets et des programmes afin de répondre aux différents défis liés à l’accessibilité de l’eau :

Le programme Solidarité-Eau développe des solutions techniques ainsi que des projets permettant de garantir l’accès à l’eau et à l’assainissement pour tous ainsi que pour la gestion durable des ressources en eau dans les pays en développement.

Les programmes Eau, Hygiène et Assainissement développent des solutions techniques ainsi que des projets permettant de garantir l’accès à l’eau et à l’assainissement dans le but de réduire durablement la prévalence des maladies hydriques. Des mesures d’accompagnement de systèmes de gestion des points d’eau, la mise en place de réseaux d’entretien autonomes sont la stratégie adoptée.

L’ONG Initiative Développement réalise des projets solidaires permettant le renforcement du pouvoir d’action des acteurs institutionnels, associatifs, des entrepreneurs et des citoyens pour gérer par et pour eux même leurs propres réponses aux grands enjeux de leur territoire. Ce mode d’intervention, en accroissant les capacités des actrices et acteurs, est à l’origine d’un développement autonome des populations et d’une approche durable du territoire. Programme d’amélioration des services d’assainissement des villes de Moundou, Nkayi et Owando, des villes assainies et inclusives. Voir aussi Inter-AGIAL : Appui à la mise en place d’une gouvernance participative et inclusive de l’assainissement liquide dans le Mono.

L’ONG Experts Solidaires permet à des collectivités, associations ou coopératives locales, qui n’auraient pas les moyens de faire appel à des experts, d’avoir accès à des avis et conseils de haute qualité, dans des projets de solidarité spécifiquement dédiés à des populations en situation de précarité. Leur mode d’intervention permet de garantir de manière juste et équitable l'accès à l’eau, l’énergie, la sécurité alimentaire, à un habitat décent dans un environnement sain et durable.
Burkina Faso (eau potable pour les déplacés, projet d’amélioration du service de l’eau et d’assainissement) ou au Cameroun (eau potable et assainissement).

L’ONG Eau et vie développe des projets et des solutions techniques permettant aux habitants des quartiers précaires de bénéficier de conditions de vie décentes par un accès durable à l’eau courante à domicile.

Projets

Projet contre le verrou 1 LIEN : l’inscription dans le droit de l’inappropriabilité de la nature

Projet : l’inscription dans le droit de l’inappropriabilité de la nature

Ce projet vise à faire sortir l’Homme de sa posture prédatrice sur la nature, de sa vision d’elle comme d’une ressource parfaitement extérieure à lui. En effet, notre rapport à l’eau s’apparente à un naturalisme foncier à son égard. C’est-à-dire la vision que l’eau représente un bien dont la valeur est régie par une logique foncière, les lois du marché. En effet son caractère incommensurable et inappropriable en raison de sa quantité, de son abondance, sa valeur est très faible aujourd’hui. Cette conception permet de croire que chacun peut s’en saisir comme d’une ressource, la manipuler, la salir, se l’approprier autant que bon lui semble sans nuire en rien aux jouissances des autres, sans leur causer le moindre préjudice. Effectivement, elle participe de la réification du commun, dans le sens où l’eau devient une chose matérielle donnée dans une pure extériorité. Ceci engendre machinalement les pollutions de l’eau, les conditions d’accès inégales et un égocentrisme très fort. Bien que personne ne puisse être propriétaire ou responsable d’éléments que l’on croit impossibles physiquement de se les approprier (on n’enclôt pas la lumière, on ne numérote pas les nuages, on ne possède pas un génome), les lois du marché et cette extériorité provoque une indifférence quant à la dégradation significative de ces derniers.
Ce projet devrait faire de l’eau un bien commun. L’humanité en prendrait soin car elle saurait qu’elle fait partie d’un tout, d’un système en synergie. Elle lui accorderait un respect en acte et/ou en moral (enjoint par des outils politico-juridiques décrivant ou prescrivant éventuellement un esprit transcendant les sociétés). L’Homme envisagerait la nature d’une façon qui très concrètement se traduit par : des comportements individuels induits par cet esprit tels que couper l’eau du robinet lorsqu’on se brosse les dents, ne pas jeter une bouteille de coca en plastique par la fenêtre, ne pas déverser des rejets domestiques toxiques dans un fleuve, un émerveillement et un respect devant la biodiversité offerte par le cours d’eau devant soi, et des changements de pratique industrielle (la pêche intensive au point de détruire les « stocks », l'orpaillage, les rejets toxiques qui compte sur le pouvoir de la dilution, etc.).
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Dans le parc national de Tongariro, des eaux cristallines se rejoignent pour former la rivière Whanganui qui coule sur près de 300 kilomètres dans l'île du nord de la Nouvelle-Zélande. Te Awa Tupua, de son nom maori, ce fleuve est crucial pour la tribu maorie qui vit sur ses berges, crucial pour leur culture et leur mode de vie.
Alors que l'exploitation à outrance du fleuve asphyxiait poissons et végétaux et polluait massivement l'eau, en mars 2017 le parlement néo-zélandais vota une loi qui accordait, pour le protéger, une personnalité juridique au fleuve et à son environnement. Aux yeux de la loi, la rivière Wanganui jouit ainsi des mêmes droits, pouvoirs, devoirs et responsabilités que toute autre personne humaine.
Très concrètement : avant de devenir une personne, la tribu devait constamment plaider en faveur de la protection de la rivière devant un parterre de conseillers locaux et de politiciens de la capitale Wellington. Les règles régissant la vie et la santé de la rivière étaient donc régies par des logiques mercantiles et des calculs bureaucratiques. Désormais, les rôles se sont inversés, ce sont ces anciens décideurs qui légalement doivent présenter leurs plans à la communauté. Le bien-être de la rivière est ainsi priorisé. Les intérêts du fleuve sont également défendus devant les tribunaux, polluer la rivière est un crime. La tribu Maori n'est pas propriétaire du fleuve mais son gardien, chargée de le protéger pour les générations actuelles et futures.
Accorder une personnalité à une entité non humaine soulève des questions lorsqu'il s'agit d'assumer la responsabilité des actes de l'entité. Le fleuve est-il légalement responsable par exemple s'il cause des dommages matériels et humains, s’il cause une inondation ? Bien sûr, il ne peut pas être poursuivi si quelqu'un se noie dans ses eaux de la même manière qu'un propriétaire pourrait l’être pour ne pas avoir clôturé une piscine. En revanche, les responsabilités du fleuve impliquent que les autorités puissent installer des canaux et des digues pour réguler son flux et éviter les crues.
Ce projet est très spécifique à une situation culturelle et géographique, on peut se demander s’il est reproductible ailleurs. En effet, ces natifs Néo-Zélandais se battaient depuis les années 1870 pour obtenir ce texte. "Cela marque la fin du plus long litige de l'histoire du pays", a déclaré le procureur général Chris Finlayson après le vote : "Cette législation est une reconnaissance du lien spirituel profond entre les iwi [la tribu] Whanganui et son fleuve ancestral. ». Un adage Maori dit concernant Te Awa Tupua : « je suis le fleuve et le fleuve est moi ». Cette relation à la nature (dépourvue de la dichotomie nature/culture) est singulièrement différente de celle que nous occidentaux entretenons avec elle. Ici, le droit l’a constaté et traduit juridiquement. Il s’agit donc que le droit prescrive cette relation. Effectivement, la nature d’une loi n'est pas seulement d'être performative (prévenir des dégâts), car elle est fondée et fonde à la fois des valeurs philosophiques et éthiques. C’est en cela que l’appareil législatif est un outil puissant pour changer les esprits et prescrire un autre rapport à la nature.
Projet contre le verrou 6 LIEN : projets sociotechniques en irrigation

Projet : projets sociotechniques en irrigation

Aujourd’hui les techniques d’irrigation les plus utilisées dans l’irrigation agricole de par leur facilité de mise en place et de leur bas coût sont les moins efficaces (ex: l’irrigation par inondation avec seulement 40-50% d’efficacité).

En 2050, les techniques d’irrigation privilégieront :
  • Des structures d’alimentation en eau basées sur le juste nécessaire
  • Des techniques irrigateurs et economisatrices en eau
  • Des systèmes les plus “naturels” possibles
  • Des systèmes respectueux de l’environnement et sans traumatiser l’environnement dans lequel il s’insère
  • Des structures simples d’usage et de constitution
  • Des structures peu chère abordables pour tous les agriculteurs
  • Des structures avec une efficacité d’irrigation optimale

Parmi les techniques d’irrigation pré-existantes permettant de réduire la consommation d’eau et augmenter l’efficacité d’irrigation des cultures, nous retrouvons :
  • La micro-irrigation a été développée vers la fin des années 60 et est surtout utilisée dans la fruiticulture, la viticulture et l’horticulture. Cette technique connaît un essor considérable dans les régions de climat aride ou dans d’autres qui font face à une pénurie de ressources hydriques pour l’irrigation, comme l’Espagne, la Californie aux USA et la région nord-est du Brésil.
  • La micro-aspersion, procédé souvent appelé « goutte à goutte », consiste à utiliser des micro-diffuseurs installés sur les canalisations, donc très proches du sol. L’aspersion se limite à la surface occupée par les cultures, avec une portée de 1 à 2,5 m. Les débits sont plus importants qu’avec des goutteurs, variant de 10 à 60 litres/h. Cette technique est très répandue dans l’arboriculture.
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Un tel dispositif se compose généralement d’un dispositif en tête de réseau permettant de régler le débit d’eau et de filtrer l’eau, de plusieurs conduites d’eau en PVC ou en polyéthylène de plus ou moins haute densité selon qu’il s’agit de conduites principales ou secondaires d’un diamètre de 10 à 16 mm et de micro-diffuseurs, micro-tubes en polyéthylène basse densité destinés à n’asperger qu’un arbre ou une plante.
Ce qui rend sa diffusion sur les terres agricoles difficile, c’est avant tout son coût d’achat et son coût d’installation.
Aujourd’hui, des projets techniques sont mis en place pour améliorer ce type d’irrigation et surtout pour la rendre plus attractive pour les compagnies d’irrigation en facilitant les installations de système, en optimisant l’irrigation et la rendant plus autonome.

Deux projets sont ici présentés, 2 approches drastiquement différentes mais toutes deux intéressantes à étudier.
1. Le projet RAINOLVE
Ce projet est catégorisé comme une solution technique high tech qui a pour but d’autonomiser les systèmes d’irrigation et de les rendre intelligents par eux même dans la manière de gérer l’eau destinée à l’irrigation des plantes.

Ce système est basé sur l'intelligence artificielle, c'est-à-dire un algorithme capable de déterminer quand une plante a besoin d'être arrosée ou irriguée grâce à des informations provenant de capteurs installés dans le sol, ainsi que des prévisions météorologiques. Les données collectées sont envoyées à un serveur, puis traitées par l'algorithme. Le système implique l'utilisation de 3 composants principaux :
  • Les capteurs installés dans le sol. Ils collectent des données qui sont envoyées au serveur via des liens. Les capteurs fonctionnent en utilisant le concept agronomique de la capacité du champ d'humidité du sol.
  • Les Links : ils utilisent la technologie Wi-Fi en utilisant le protocole ZigBee. Ils transfèrent les données reçues des capteurs et des unités de contrôle vers le serveur ;
  • Unités de contrôle : elles existent en version 9VDC et 24VAC, et activent le système d'irrigation ou d'arrosage en ouvrant et fermant des électrovannes.

Ce projet repose donc sur des objectifs louables et incontournables de juste nécessaire dans l’alimentation en eau des cultures. La collecte de données permettant d’appréhender correctement l’environnement auquel sont “soumises” les terres agricoles ce qui est absolument nécessaire pour permettre une agriculture raisonnée et une alimentation en eau adaptée. Pour que ce système fonctionne et soit efficace, il faut avant tout que les plantations soient réalisées dans des environnements qui leurs soient adaptés. Attention nous ne parlons pas ici d’adapter l’environnement aux plantations comme peuvent le simuler les serres agricoles par exemple, mais d’implanter des cultures qui sont viables naturellement dans ces environnements sans compenser artificiellement les besoins en eau des cultures. Cette solution permettrait donc de réduire les effets de gaspillage de l’eau, d’optimiser au maximum l’irrigation et donc l’énergie nécessaire pour cette dernière.
Toutefois, dans une optique de remettre au centre des considérations la nature et l’eau et non pas le profit et l’argent, ce système complètement artificiel vient se confronter directement avec ce qui a de plus naturel qui soit. Autrement dit, cette solution voulant rendre l’irrigation plus adaptée à l’environnement, plus respectueuse, plus économisatrice d’eau vient imposer aux cultures une forme d’artificialité qui ne me semble pas compatible avec le développement naturel. Mais est ce que l’agriculture en elle-même n’est pas une forme d’artificialité? Mettre en terre des centaines de plants de carottes tous alignés les uns avec les autres et tous les alimenter en eau à la même heure et à la même quantité n’est pas déjà imposer à la nature une contrainte non naturelle ?

Les verrous que pourrait rencontrer le projet technique Rainolve :
  • Réticence budgétaire : Budget : Coût total : EUR 71 429 ; Contribution UE : EUR 50 000
  • Réticence des agriculteurs locaux traditionnels
  • Perte du savoir des agriculteurs
  • Dépendance à la connexion internet : Pb de gestion en cas de coupure ; Pb de développement dans les zones qui n’ont pas ou faiblement accès à internet
  • Unités de contrôle centralisées
2. Le projet Irrigio
Ce projet est catégorisé comme une solution technique low tech qui a pour but d’autonomiser les systèmes d’irrigation dans la manière de gérer l’eau destinée à l’irrigation des plantes de manière plus simple et efficace. La zone d’action de ce système est l’alimentation en eau de l’entièreté du système.Ce système est une vanne pour contrôler les systèmes d’arrosage automatiquement.
Voir https://www.irrig.io/#projet
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[1] Cette vanne assure selon le producteur une facilité d’utilisation : conçue pour être facilement adaptée sur les réseaux d’arrosage domestique et autre type d’irrigation
[2] Elle assure également une forme d’adaptabilité : elle est réglable avec un réglage précis et intuitif pour répondre au mieux aux besoins des plantes.
[3] Cette vanne possède une forme d’intelligence naturelle La vanne repose sur la réaction naturelle des matériaux à l’humidité du sol pour déterminer l’arrosage des plantes.
Cette vanne est adaptable à différents usages: l’irrigation privée des jardins ; l’irrigation publique des espaces verts et enfin l’irrigation en zones agricoles.
Ce projet repose donc sur des objectifs louables et incontournables d’adaptation de l’irrigation en fonction des besoins des plantes. Simple d’utilisation et robuste, la Vanne d’Arrosage Irrigio permet d’arroser ses cultures en toute confiance. Elle est conçue afin d’être simple d’utilisation, facilement implantable et réparable afin de gagner un maximum de temps aussi bien à l’utilisation qu’en maintenance. Son objectif est, et reste, d’économiser du temps tout en permettant une meilleure efficacité dans l’utilisation de l’eau et donc une meilleure pousse des plantes et elle permet de diminuer le gaspillage en eau lié à l’irrigation. De plus, elle se base sur les réactions naturelles des matériaux qui la composent à l’humidité du sol pour juger de la qualité de l’arrosage des plantes, ce qui permet d’alimenter en eau en juste nécessaire. Cela peut permettre d’obtenir un coût d’achat réduit et d'inciter les grandes compagnies irrigantes de se fournir en vanne Irrigio pour alimenter facilement leurs terrains agricoles. Elle n’est pas sujette à ces arrêts intempestifs car elle ne dépend pas de systèmes annexes dans son fonctionnement en elle-même. Elle est indépendante de l’électricité et n’est pas sujette aux pannes électroniques.
Cette vanne constitue donc une « voie du milieu » entre un retour au moyen âge (décroissance) et la « fuite en avant » des dernières décennies. Elle débloque le verrou initial: “choix d’utilisation de technologies d’alimentation en eau pour les cultures basé sur l’économie financière et non sur l’économie de l’eau et la recherche en efficacité.” car elle permet une production locale et une réflexion sur le cycle de vie du produit pour diminuer l’impact écologique, avant la rentabilité économique.

Le seul inconvénient à l’heure actuelle est que le fonctionnement de transmission de l’information de l’état d’arrosage du sol entre la partie immergée dans la terre et le réglage de la vanne reste encore brumeux on ne saisit pas bien comment cela se passe concrètement. De plus, en recevant l’information de l’humidité du sol, de quelle manière la vanne sait comment régler son ouverture et donc son débit sans savoir de combien les plantations ont besoin.

Les verrous :
  • Un fonctionnement technique encore trop flou
  • Une conception lowtech trop souvent caricaturée comme un retour en arrière
  • Les structures d'irrigation sont déjà instaurées il est donc plus difficile d’implanter cette vanne qui doit être adaptée aux tuyaux d’irrigation
Projet contre le verrou 11 LIEN : programmes et interventions sur l’eau en milieu scolaire

Projet : programmes et interventions sur l’eau en milieu scolaire

Certaines écoles proposent dès la primaire des interventions centrées sur l’eau, comme l’intervention du SIVOA (syndicat de l’orge; rivière sillonnant l’Essonne), proposant des activités ludiques et pédagogiques pour sensibiliser les jeunes au cycle de l’eau, à la préciosité de cette ressource.

Opérations d’information lors de salons, conférences ou promenades commentées, actions pédagogiques sur la protection de l’environnement, animations au service de l’Orge et de sa vallée.

Les animateurs du Syndicat sensibilisent un public très large à la protection de l’eau et des milieux naturels. Afin d’appréhender les notions clés liées à l’eau et au développement durable, au programme des écoliers du cycle 3 (CE2, CM1, CM2) et des collégiens, de nombreuses animations pédagogiques et ludiques sont proposées aux enseignants du territoire de la vallée de l’Orge.

À l’aide d’outils et de supports variés, les animateurs du Syndicat transmettent des connaissances autour du thème de l’eau : le cycle naturel de l’eau, le cycle de l’eau domestique, la biodiversité, la lutte contre les inondations... Ils font prendre conscience à chaque élève de son rôle dans la préservation de cette précieuse ressource.

Les animateurs et animatrices du Syndicat de l’Orge sensibilisent les élèves du territoire (écoles, collèges et lycées) à la préservation des ressources naturelles et de la biodiversité. Axées sur la découverte de l’environnement et les missions du Syndicat, de nombreuses animations pédagogiques et ludiques permettent aux enfants de comprendre l’importance de protéger la nature. Grâce aux éco-gestes enseignés pour économiser l’eau potable et préserver le milieu naturel, les élèves ont même les clés pour agir.
Projet contre le verrou 14 LIEN : l’accès et la décentralisation de la production d’eau potable

Projet : l’accès et la décentralisation de la production d’eau potable

L’accès des zones très rurales à l’eau potable est difficile et expose des habitants à un stress hydrique allant jusqu’à exploiter des sources d’eau impropres à la consommation.

Une piste de projet pour surmonter le défi de l’accès universel à l’eau potable passe par l’encapacitation de chaque habitant à participer à la production de l’eau potable qui lui est utile. En effet, un premier bénéfice de cette encapacitation peut être tirée par la sensibilisation au caractère précieux de l’eau, qui résulte souvent en un usage plus modéré et raisonnable de la ressource. Mais de nombreuses propositions faites d’infrastructures de production d’eau potable en zone rurale ont échoué par un manque de de considération de l’intégration sociale de la technique apportée. Lors de la panne ou de la dégradation de l’équipement, celui-ci se retrouve laissé à l’abandon si personne n’est chargé de sa maintenance ou formé à pouvoir le réparer.

D’autres alternatives, comme la désalinisation de l’eau de mer par exemple, à été proposée en tant que solution au stress hydrique de certaines zones. Mais là encore les usines sont décentralisées, loin des zones d’habitation des consommateurs et très énergivores. Ainsi les infrastructures sont très coûteuses en pétrole (l‘Arabie Saoudite est le plus gros producteur d’eau désalinisée…) et rejettent des eaux salées déséquilibrant les milieux marins. L’eau produite est finalement très chère et ne peut se présenter comme une solution à long terme.

Après le constat de certains projets déjà existants concernant l’eau potable en zone rurale, de nouvelles propositions doivent être faites pour espérer un jour atteindre un monde où chacun jouit de l’accès à chacun de ses besoins vitaux, donc à l’eau potable.

Les propositions doivent prendre en compte l’aspect économique et politique de la gestion diplomatique de l’accès à la ressource produite, mais doivent également se composer d’une solution intrinsèquement sociotechnique. Le développement d’une technique consciente et adaptée aux habitudes sociales, aux matériaux disponibles au fonctionnement du groupe d’habitants est nécessaire. Les consommateurs eux-mêmes devront être formés à l’utilisation, au fonctionnement, à la construction et à la réparation des infrastructures pour en assurer la pérennité.

Un exemple actuel de projet mené sur ces bases est celui de Warka Water. C’est une association à but non lucratif ayant créé des infrastructures destinées à l’alimentation de villages en eau potable issue de la condensation de l’air.
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Projet basé sur un besoin d’accès à l’eau potable et avec une réflexion menée autour des disponibilités locales :
  • Matériaux : essentiellement du bambou, déjà utilisé pour la majeure partie des constructions du village.
  • Outils : savoir-faire local
  • Construction : montage en plusieurs étapes, n’implique aucune intervention de grues même si structure de plusieurs dizaines de mètres de haut.
  • Lieu de cohabitation : zones d'ombre, zones de potager …

Cet exemple témoigne de la faisabilité de la production d’eau dans des zones de stress hydrique important. Et ce sans dépendance à des infrastructures industrielles et avec une totale production menée par le consommateur lui-même.

Les pistes qu’il semble encore manquer est la mise à l’échelle. En effet cette solution ne s’adapte encore que difficilement à des populations importantes et est dépendante de conditions météorologiques variables qui ne permettent pas d’assurer la sécurité des consommateurs. Le changement climatique ne saura qu’amplifier l’incertitude de la collecte d’une eau suffisante pour l’intégralité du village dans les années à venir.
Projet contre les verrous 1 LIEN, 5 LIEN et 9 LIEN : la phytoépuration

Projet : la phytoépuration

“ La phytoépuration est un procédé naturel de filtration ou de dépollution des eaux usées par les plantes. Il s’agit plus précisément d’assainir les eaux usées par les bactéries cachées dans le système racinaire des plantes qui sont dites épuratrices. Le procédé est tout à fait écologique, sans odeurs et peut être très esthétique.” (Selon une page Jardinage du journal Le Monde)

Voici, tout d’abord, quelques constats au sujet de cette pratique :

État actuel : réservé à quelques zones géographiques, trop souvent pratiqué uniquement chez des particuliers, vu comme réservé à des éco-habitats, pratique trop peu connue.

État souhaité : la phytoépuration a le potentiel pour devenir quasiment la seule méthode de traitement des eaux, dans tous les milieux, domaines et habitats, car elle est entièrement naturelle et d’une efficacité redoutable.

Points de blocage, selon différents points de vue :
  • Techniques : Nécessite de la place
  • Économiques : Même si l’investissement est moindre, il s’agit, dans les villes par exemple, de créer les conditions tant physiques qu’environnementales et structurelles à l’insertion de telles installations, qui peuvent alors s’avérer onéreuses.
  • Socio-culturels : Les eaux usées sont vues comme sales, il faut s’en débarrasser, mais surtout les dérober à la vue et ne plus avoir affaire avec. Associé à l’écologisme (= anti-technique). Pratique peu connue du grand public.
  • Politiques : La pratique n’est pas spécialement encouragée, voire même elle n’est pas mentionnée. Pas de financements pour la phytoépuration.
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Il existe de nombreuses techniques de phytoépuration, comme représenté dans l’illustration ci-dessus, mais le principe demeure identique : une eau “sale” à traiter, parvient jusqu’au site de phytoépuration, où sont installées des plantes spécifiques, et en ressort “propre”, grâce à l’action de ces végétaux.

En effet, les plantes sont soigneusement choisies pour leurs propriétés naturelles époustouflantes, et elles sont accompagnées d’un milieu adéquat, riche en minéraux, substrats et autres bactéries pour que le système soit le plus efficace possible. La phytoépuration repose donc sur des synergies et collaborations entres différents êtres vivants, mais tous les processus qui la composent ne sont pas biologiques. En effet, le choix du substrat inerte (sableux par exemple) qui compose la base fermée du bassin de phytoépuration est capital, car les métaux lourds et le phosphore s’y absorbent. La matière organique, elle, est dégradée principalement par des microorganismes promus par la présence de certaines plantes, et d’autres éléments, comme le nitrogène, sont retenus par des processus biologiques naturels des végétaux choisis.

Un avantage supplémentaire de la phytoépuration est qu’elle peut ne pas être utilisée seulement pour traiter des eaux usées, mais aussi pour purifier des zones aqueuses polluées, lacustres par exemple, puisqu’elle peut se réaliser grâce à des plantes macrophytes subaquatiques, flottantes ou émergentes, à condition de trouver une espèce non invasive à laquelle le milieu à traiter convient.
En somme, la phytoépuration, d’installation simple mais réfléchie, et de fonctionnement complexe car naturel, est une représentation intéressante d’une étroite collaboration entre vivants qui tous en retirent profit : êtres humains, végétaux, microorganismes, mais aussi insectes, amphibiens et mammifères aquatiques aujourd’hui de plus en plus rares.

En France, quelques entreprises ont choisi cette voie, par exemple :

Ces entreprises travaillant plutôt à une échelle locale, il devient capital de réaliser des sensibilisations auprès des communes et habitants des zones rurales, mais aussi des communautés citadines. L’obstacle n’est pas réellement économique, en tout cas en zone rurale, sinon structurel et culturel : il faut trouver l’espace pour réaliser ces projets, il faut sensibiliser aux fabuleuses capacités biologiques de purification, il faut faire connaître ces solutions aujourd’hui méconnues du grand public, et il faut accepter de voir dans l’entourage proche des habitations ce qui aujourd’hui est enfoui. Les canalisations souterraines et autres réseaux opaques font en effet partie de l’invisibilisation des déchets générés et dissimulent la réalité de la complexité du traitement des eaux usées, mais aussi sa matérialité : il faut des centaines mètres, voire plus, pour que les eaux parviennent à une station d’épuration, dont le fonctionnement est incompréhensible et hermétique de l’extérieur.

Bien sûr, pour entreprendre la généralisation des stations de phytoépuration, il faut déjà faire en sorte que les eaux usées ne soient pas sursaturées de déchets ménagers ou objets jetés par négligence, c’est donc aussi un mode de vie qui est à modifier profondément.